2019

MATTHIEU GAFSOU

SOLASTALGIE

Matthieu Gafsou est un photographe franco-suisse, né en 1981. Après une maîtrise en philosophie, littérature et cinéma à l’Université de Lausanne, il étudie la photographie à l’Ecole des Arts Appliqués de Vevey. En 2009, il reçoit le prestigieux «Prix de la fondation HSBC pour la photographie» et en 2010, il est invité dans l’exposition collective ReGeneration2 au musée de l’Elysée avec la Fondation Aperture. En 2014, son travail Only God Can Judge Me est présenté au Musée de l’Elysée à Lausanne.

Ses séries photographiques ont fait l’objet de cinq monographies et de nombreuses publications. Parallèlement à sa pratique artistique, il enseigne à la haute école d’art et de design de Lausanne (ECAL). En 2018, son dernier projet, H+, a fait l’objet d’une grande exposition monographique aux Rencontres de la photographie d’Arles.

Il vit et travaille à Lausanne en Suisse.

Le futur est devenu un horizon inquiétant. C’est le point de départ de ce projet : la transformation qui s’est opérée dans ma relation au monde, l’effritement d’une vision d’avenir sereine, l’apparition de l’angoisse non plus comme révélateur de mes failles intimes mais de la menace qui pèse sur «l’extime» : le territoire, le monde, ce qui m’entoure et me semblait immuable … Plutôt que de limiter uniquement mon projet à l’énumération factuelle des causes de cette crise (pollution, réchauffement, crises sociales et migratoires, crises financières, etc.), plutôt que de convoquer uniquement de grands concepts, comme l’anthropocène par exemple, j’ai choisi de thématiser la dimension intime d’un tel horizon. Comment suis-je affecté par cette perspective et surtout comment cette dernière, déjà, par touches discrètes, influence mon quotidien. Pour ce faire, j’ai décidé de mettre en œuvre un langage visuel éclaté, complexe, qui tout à la fois montre certains aspects factuels (la neige qui fond en février dans les Alpes par exemple), d’autres intimes ou proches de mon quotidien (ma famille…). Mais il me semblait essentiel d’intégrer à ce projet une dimension philosophique, de questionner notre relation à ce qui nous entoure et d’essayer de thématiser la violence de notre relation à notre milieu. C’est la raison pour laquelle j’essaie de fabriquer des images qui témoignent d’une relation autre à l’environnement (car le paysage dans sa forme artistique renvoie souvent à une forme idéalisée du territoire que j’essaie de questionner). Enfin, certaines photographies, plus ambiguës, rappellent mes propres contradictions et mettent littéralement en scène la violence de ma façon de me servir des ressources qui m’entourent. Ce projet est donc constitué d’un noyau de photographies documentaires régulièrement balancées par des images plus allégoriques qui permettent de déplacer la représentation vers des dimensions philosophique et personnelle. Il s’agit de rendre intimes les questions posées par la science, d’opérer ce glissement vers le sensible et de participer à un concert de voix que j’estime à titre personnel nécessaire. Merci aux laboratoires du CNRS qui m’ont aidé à réaliser ce projet, en particulier le laboratoire Evolution et diversité biologique, le Centre national de recherches météorologiques, ainsi que le Service des avions français instrumentés pour la recherche en environnement.

FR